Dangereux pour la santé à des niveaux élevés, le bruit peut, à des niveaux beaucoup plus faibles, occasionner d’autres effets et d’autres conséquences :

  • Être une gêne pour les personnes par les difficultés à percevoir certains signaux d’alerte ou de danger,
  • empêcher la communication entre les personnes,
  • gêner la concentration pour effectuer certaines tâches délicates,
  • être source de fatigue,
  • être source de stress.

Ces effets peuvent être une cause d’incidents, voire d’accidents du travail. La prise en compte de ces effets est aussi nécessaire dans le cadre de l’évaluation des risques.

La gêne est le principal effet subjectif du bruit. Elle est définie par l’OMS comme « une sensation de désagrément, de déplaisir, provoquée par un facteur de l’environnement dont l’individu ou le groupe reconnaît ou imagine le pouvoir d’affecter la santé ».

 

Comme nous l’avons vu précédemment, au-delà des caractéristiques physiques du bruit, des facteurs organisationnels vont avoir également un impact sur cette gêne :

 

  • la présence ou absence d’un autre bruit auquel il faut être vigilant car nécessaire à la tâche,
  • la possibilité de pouvoir interrompre ou pas cette gêne, de faire une pause dans un milieu calme,
  • sans oublier le contexte dans lequel survient cette gêne (exemples : contexte tendu socialement, agressions verbales quotidiennes) et qui peut rendre insupportable le moindre bruit.

…et ses effets sur l’Homme

Le bruit et la gêne occasionnée par celui-ci ont également des effets non auditifs dits « non traumatiques » provoqués principalement par le stress.

 

Lorsque la situation bruyante n’est plus supportable par l’organisme, celui-ci réagit en mettant en place des mécanismes de défense (sécrétion d’hormones) pour répondre, par exemple, à l’augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle, comme il le ferait face à une agression psychique.

 

Le bruit ou la gêne sonore peuvent alors devenir un facteur aggravant de stress chronique entraînant des difficultés de concentration et de mémorisation, d’intelligibilité de la parole, des erreurs, une irritabilité et une fatigue pouvant augmenter à terme le risque de maladies cardiovasculaires ou de troubles psycho-sociaux (dépressions, etc.). L’altération du sommeil dans sa structure et sa qualité est également un des effets non auditifs non négligeable aggravant les possibilités de récupération.

 

Les risques d’augmentation du stress, les risques de troubles musculo-squelettiques, la charge mentale ou la charge posturale liés à l’organisation du travail ou au management sont l’objet de l’attention de nombreux préventeurs, ergonomes, psychologues, notamment pour la fonction d’opérateur en centre d’appels.

 

Le préventeur est conscient que le bruit est souvent un point d’entrée pour les salariés qui ont à se plaindre d’un mal-être au travail, parfois lié à des causes plus difficiles à exprimer ou à identifier clairement.

 

Des recommandations, à défaut d’une réglementation

Aucune disposition réglementaire ne limite le niveau de bruit ambiant dans un local de travail tant que ce niveau n’atteint pas les seuils lésionnels comme décrits dans les chapitres précédents.

 

Néanmoins, diverses recommandations, applicables au secteur tertiaire, permettent de déterminer dans quelle mesure les salariés soumis à un certain bruit ambiant peuvent être capables d’effectuer leur travail en évitant la fatigue et en particulier la fatigue auditive, en diminuant les risques de stress (le bruit étant un cofacteur) et en maintenant leurs performances (par exemple : diminution des risques d’erreurs).

 

Ces recommandations concernent notamment les critères de performance acoustique de locaux de travail spécifiques (par exemple la norme NF S 31-080 : Acoustique, Bureaux et espaces associés, Niveaux et critères de performances acoustiques par type d’espace).

 

Liens entre « tâche » et « bruit », bibliographie sélective

Une gêne, de la fatigue, des difficultés de concentration pour effectuer certaines tâches sont associées au niveau sonore du bruit ambiant. Cependant il ne faut pas oublier l’activité à proprement parler : ainsi, plus la tâche à réaliser sera délicate, complexe et nécessitant de la réflexion et de la concentration, et plus le bruit sera perturbant.

 

Pour définir les niveaux de gêne, on peut faire référence aux courbes de Wisner. Utilisées couramment par les préventeurs, ces courbes fixent des limites à des ambiances sonores supportables ou non par des salariés du tertiaire, selon la difficulté du travail intellectuel qui leur est demandé. Cela nécessite cependant de disposer de la valeur du bruit de fond par bandes de fréquence.

 

Référence : WISNER A. « Manuel Bruits et Vibrations ». Chapitre II : Éléments de Physiologie et de Pathologie des Bruits. Editions INRS n°254B, 1970.

 

On peut cependant évaluer la gêne en fonction du niveau sonore global. On trouve ainsi dans la bibliographie des limites de bruit de fond. Par exemple, l’INRS, pour les centres d’appels téléphoniques fixe les limites dans une brochure spécifique du niveau de bruit de fond à 52 dBA (travail intellectuel non-gêné) ou 55 dBA (travail sur écran plus routinier).

 

Référence : Fiche pratique de sécurité – ED 108 « Les centres d’appels téléphoniques ».

 

Ou encore par des normes françaises ou internationales qui fixent la limite, pour les locaux ouverts occupés par des salariés, à 55 dB(A).

 

Références : ISO 9241-5:1998 « Exigences ergonomiques pour travail de bureau avec terminaux à écrans de visualisation ». NF X 35-102 « Conception ergonomique des espaces de travail en bureaux ».

 

Ambiance, variation, vie privée : le bruit, une problématique sociétale ?

Les études effectuées depuis des années dans le domaine de la psycho-acoustique montrent que le confort acoustique ne peut être complètement évalué par des critères globaux aussi simples que le bruit ambiant. Les variations brusques du niveau, l’émergence ponctuelle de bruits forts dans une ambiance relativement calme, des bruits non identifiés peuvent être ressentis comme pénibles. Il est donc nécessaire de ne pas se limiter au niveau sonore issu d’une mesure moyennée dans le temps mais aussi prendre en compte la stabilité du bruit.

 

Les problématiques de bruit et la gêne dépassent le milieu du travail puisque si 67 % des actifs jugent leur milieu de travail bruyant (Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, 2005), Deux tiers des personnes interrogées citent le bruit à leur domicile comme première source de nuisance (Enquête TNS SOFRES, 2010).