La Société Industrielle des Cartonneries de Lumbres (SICAL) a engagé en 2009 une procédure de substitution du formaldéhyde par une substance non CMR[1] . Une réussite, tant en termes de protection des salariés qu’en termes économiques.

 

M. Leveugle, Directeur industriel, souligne que l’objectif premier de préservation de la santé des employés a été atteint. Cette substitution a également permis « d’accompagner une économie ». Comment ? Réponse plus bas.

 
Substitution : mode d’emploi

Dans le cadre du Plan National d’Actions Coordonnées (Pnac) CMR 2009-2012, près de 400 entreprises concernées par l’utilisation de substances cancérogènes mutagènes reprotoxiques ont été accompagnées par la Carsat Nord-Picardie. L’objectif : les aider à substituer, supprimer ces agents ou maitriser ce risque au plus bas niveau.

Implantée à Lumbres depuis 1826, à l’origine comme papeterie, la SICAL emploie 300 salariés et s’est spécialisée dans trois activités : la production de pâte à papier et de papier à partir de récupération, la fabrication de plaques de cartons ondulés et la fabrication d’emballages plastiques. Leurs clients, plus de 600, proviennent des secteurs industriels ou agro-alimentaires. Ils sont issus en majorité du Nord de France.

DSCN9324 SicalL’entreprise a mis un point d’honneur à partir de 2009 à remplacer le formaldéhyde. Celui-ci était intégré à la composition de la colle amylacée nécessaire à la fabrication des plaques de cartons ondulés. Cette colle permet de contre-coller les feuilles entre elles lors du passage dans l’onduleuse[2]. A l’origine, aucune indication de nocivité pour la santé des salariés concernant le formaldéhyde n’était précisée.

Selon les propos de M. Matula, Responsable environnement : « En 2004, on avait encore une fiche de suivi qui n’indiquait aucun danger à proprement parler du formaldéhyde. Donc on avait « formol, composé non dangereux ». La première campagne CMR lancée en 2006 par la Carsat Nord-Picardie, la Direccte[3] et les Services de santé au travail, a mis en avant une liste de substances classées CMR. Le formaldéhyde en faisant partie, la SICAL a entrepris une démarche interne de substitution. Concrètement : en 2009 le formaldéhyde a été remplacé par un produit non CMR composé d’eau, d’hydroxyde de sodium et de dazomet. Ce dernier a été remplacé depuis 2013 par une substance contenant de l’eau, du 1,2 – benzisothiazol – 3 (2H) – one, et de façon très infime de l’hydroxyde de potassium et de l’hydroxyde de sodium.

24 salariés étaient susceptibles d’être confrontés à la colle au fil de la chaîne de production, dont l’un était particulièrement exposé dans la mesure où il était chargé de transporter et d’insérer le formaldéhyde au sein de la pompe de dosage. Ainsi, en 2009, le fournisseur a donné l’opportunité à l’entreprise de tester un nouveau produit non classé CMR. Cet essai, d’une durée de 3 mois, s’est avéré concluant, la décision a été prise de conserver cette substance. Mr Matula indique : « Evidemment, on ne peut pas passer d’un seul coup, du jour au lendemain à la substitution pure et simple d’un produit par un autre, parce qu’il faut tenir compte des besoins urgents de la production. » Le suivi réalisé dans le cadre du Pnac CMR 2009-2012 a également été un des moteurs du lancement de la procédure de substitution.

 
Mais alors, d’un point de vue économique, quel effet ?

La substitution a été l’occasion d’engager des réflexions sur l’ensemble du processus de production, notamment sur le dosage de la colle. La consommation de colle est passée de 12g/m² à 8g/m², et au-delà, c’est l’ensemble du processus qui a été revu. Des investissements ont été effectués sur l’onduleuse pour modifier DSCN9327 Sical2les circuits de chauffe afin d’améliorer l’efficacité du procédé. « On a profité de cette substitution pour retravailler tous les paramètres, et pour que ça débouche sur une économie», précise Mr Leveugle.

Par ailleurs, un accompagnement a été effectué auprès des salariés au niveau de la modification des procédures, afin de les rassurer et de les conduire vers le changement. L’objectif était de les convaincre que les évolutions visaient le « bien de tous ».

L’entreprise s’inscrit dans une démarche d’amélioration continue des conditions de travail des salariés. En effet, la première substance ayant remplacé le formaldéhyde, avait la particularité d’être corrosive et dangereuse pour l’environnement. Elle est maintenant à nouveau substituée par un autre produit qui comporte uniquement la caractéristique d’être corrosif. La SICAL réfléchit de façon permanente à la progression des procédés dans l’objectif d’optimiser la protection des salariés. Mr Leveugle conseille aux entreprises tentées par la substitution de « ne pas avoir peur », de « réussir à vaincre leur réticence au changement. »

L’expérience de la SICAL démontre en quoi la substitution, au-delà de la protection apportée aux salariés, a été un moyen de redéfinir les processus de travail et d’améliorer la productivité. 

 

Contact : alain.soyez@carsat-nordpicardie.fr

[1] Cancérogène mutagène reprotoxique
[2] Onduleuse : « Machine servant à confectionner le carton ondulé- Elle vise à contre-coller les feuilles entre elles (à l’aide la colle amylacée) et à onduler une voire deux feuilles s’il y a des intermittences. »
[3] Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi